La description du billet précédent montre qu’une société humaine s’auto-organise et évolue comme un cerveau humain, par restructurations successives. Le processus de criticalité auto-organisée implique que, comme l’amplitude des avalanches dans un tas de sable, l’amplitude de ces restructurations est inversement proportionnelle à leur fréquence. Les restructurations de grande ampleur sont perçues comme des effondrements de civilisations. Une société s’effondre pour être remplacée par une autre, comme en biologie une espèce succède à une autre.
Dans le cas du cerveau, les restructurations de grandes ampleur sont rares ou ont un caractère pathologique. J’ai expliqué (billet 62) que c’est parce que le cerveau humain se synchronisait avec le jour et la nuit. Son évolution est plus régulière, comme l’écoulement du sable est plus régulier lorsqu’on tapote régulièrement sur le récipient. On peut se demander si l’évolution d’une société se synchronise aussi sur des événements périodiques extérieurs. L’exemple qui vient immédiatement à l’esprit est celui des saisons.
Il est clair qu’au Moyen Orient, les premières sociétés d’agriculteurs se sont synchronisées sur les saisons. Il fallait travailler l’été et amasser suffisamment de grains pour subsister l’hiver. L’économie se réveillait au printemps pour s’endormir à la fin de l’automne. Si l’analogie avec le cerveau est correcte, cette restructuration annuelle de l’économie a sans doute permis d’éviter des restructurations plus tardives mais de plus grande ampleur telles que les effondrements de civilisations.
L’alternance des saisons dépend de la latitude. On peut donc vérifier cette hypothèse en comparant la stabilité des sociétés depuis l’équateur jusque vers le pôle. Il est frappant de constater que la plupart des exemples d’effondrements de civilisations sont le fait de civilisations à moins de 35° de l’équateur. C’est le cas des civilisations polynésiennes, comme celles d’Amérique (Mayas, Anasazis). La civilisation égyptienne ou les civilisations chinoises qui se sont synchronisées sur les crues de grands fleuves ont duré plus longtemps que les autres. Plus près des pôles, les civilisations semblent avoir été plus stables. On ne connait pratiquement pas d’exemple de civilisation nordique qui se soit effondrée, à part celle des Vikings au Groenland dont l’effondrement est sans doute d’origine climatique.
Lorsque les européens ont découvert l’Amérique, des peuples d’origine latine ont colonisé l’hémisphère sud tandis que des peuples d’origine essentiellement anglo-saxonne colonisaient l’hémisphère nord. La différence des deux cultures est frappante. Les premiers se sont mélangés aux autochtones tandis que les seconds les ont exterminés. Plus prédatrice, la culture anglo-saxonne est aussi plus dissipative d’énergie (1). Ce sont les anglo-saxons qui ont lancé la révolution industrielle, révolution qui nous mène aujourd’hui à une catastrophe écologique. Est-ce parce que ces peuples venus du nord n’ont jamais connu d’effondrement tandis que, plus circonspects, les peuples latins garderaient encore en mémoire dans leur inconscient collectif le souvenir de l’effondrement de l’empire romain?
J’ai vécu 16 ans aux États-Unis. On y trouve les mêmes fruits et légumes tout au long de l’année. Lorsqu’un fruit n’est plus disponible dans l’hémisphère nord, on l’importe de l’hémisphère sud. De retour en France, j’ai retrouvé avec plaisir le bon goût des fruits et légumes locaux et de saison. Avec l’épuisement de nos ressources pétrolières, il devient clair qu’une société qui ne respecte pas le rythme des saisons est vouée à s’effondrer plus tôt que les autres.
(1) On retrouve un peu la même différence de culture entre la France du nord et celle du sud.
Cher Monsieur, en lisant l’article vous concernant sur « de defensa », j’ai aussitôt de compris , pourquoi dans notre pays ou la liberté d’expression est si importante vous aviez disparu le Saker, en même temps que le grand guignol charly,rendait fou toutes ces »foules sentimentales »qui se laissent berner si facilement! « Celui qui dit la vérité doit être assassiné »….. Nous attendons avec calme et détermination le plaisir de vous lire de nouveau. Je vous envoie toute mon estime pour vous et votre femme. Vive le Saker francophone, MERCI. Marie Goller
« L’alternance des saisons dépend de la latitude »
Voulez-vous dire que plus on se rapproche de l’équateur moins les saisons sont marquées ?
Exact.